Dans les services publics, certains agents s’octroient leur propre emploi du temps. Présents quand ça les arrange, absents quand ça leur chante.
Loin d’être un phénomène de mode, l’indiscipline dans les services publics s’est installée depuis belle lurette. Les témoignages ne manquent pas car très souvent les citoyens en payent le prix. Des plus petits aux plus grands, des structures moins importantes aux plus grandes, chacun a vécu, d’une manière ou d’une autre, l’expérience.
Cette réalité de l’indiscipline dans le service public est omniprésente. Gardant l’anonymat, un ancien lycéen se rappelle bien le calvaire dû à l’absence de certains professeurs au lycée Mahamane Alassane Haidara de Tombouctou. « Certains professeurs s’absentent au profit des lycées privés. » On retrouve la même réalité dans d’autres établissements publics. La situation ne s’améliore pas, semble même aller de mal en pis.
Mohamed. D, un jeune étudiant, se voyant refuser sa bourse d’étude, décide de se rendre au CENOU « vers 13H-14H », dans l’objectif de savoir pourquoi. Cependant, amer est le constat, « À la réception, ils m’ont dit qu’ils étaient absents », affirme-t-il, c’est la seule réponse qu’il aura. Et comment y croire ? Il fallait voir de ses propres yeux. M.D confirme : « J’ai trouvé que les agents du bureau qui s’occupent des documents du rejet étaient absents ». Le mal est profond et touche un peu partout dans le pays.
Sur les réseaux sociaux, les témoignages se multiplient, témoignant de la frustration croissante de la population face à cette situation. Un internaute relate l’expérience d’un ami qui « a passé sa journée dans un service public de 8H30 à 11H30 pour obtenir un document qui, normalement, aurait pu être obtenu en 30 minutes. De la conception à la signature, il a fallu attendre 3 heures. Le motif : le chef vient à 11h tous les jours. Et la véritable victime reste le citoyen lambda comme l’affirme l’internaute « Le fonctionnaire abuse, l’État paye, alors que par l’inversion de la chaîne de contribution, c’est le contribuable qui supporte ».
Ce dysfonctionnement ne se limite pas aux établissements éducatifs, il touche également les hôpitaux. Il n’est pas rare que les agents laissent leur poste au même titre que leurs patients entre les mains de stagiaires. D’autres divaguent entre leur clinique à caractère personnel et l’hôpital public. Les populations ne cessent de se plaindre, mais malgré cela, les témoignages s’intensifient, plus glaçants les uns que les autres. Enceinte, Salimata Haidara avoue « faillir perdre son enfant parce que la sage-femme était absente ». Une situation qui alarme, mais une fois le tragique évité, on tourne la page. Aucune sanction.
Le ministre de l’Entrepreneuriat national, de l’Emploi et de la Formation professionnelle a effectué le 13 février dernier une visite inopinée à un service de son département, selon sa cellule de communication – MENEFP : « Cette visite surprise trouve son sens, car il a été constaté dans les services publics, un taux élevé d’absentéisme et de retard ». Il devient quasi difficile de fermer le rideau. Pas besoin d’être spécialiste, la réalité saute aux yeux. Quelques jours auparavant, le 17 janvier dernier, circulait une circulaire du ministre du Travail, de la Fonction publique et du Dialogue social où l’on peut lire : « Depuis un certain temps, mon attention a été attirée sur le non-respect des horaires légaux de travail et un absentéisme de plus en plus élevé dans les services publics ». Un message du ministre adressé à tous ses collègues ministres et gouverneurs de régions et du district de Bamako. L’absentéisme est récurrent au Mali. Et cela, dans la plupart des services.
Les communiqués, les avertissements semblent ne pas faire grand effet. Quand les prescriptions sont inadéquates, ça ne sert à rien de s’attarder sur la posologie. Pour le moment, rien n’y fait. La maladie demeure. Cette culture de l’absentéisme s’enracine de plus en plus dans les institutions publiques, minant leur efficacité et dégradant leur image.
Boulkassoum
Stagiaire