Mali, Cour suprême, 06 mai 2021, 246
Texte (pseudonymisé)
REPUBLIQUE DU MALI
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COUR SUPREME
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SECTION ADMINISTRATIVE
La Cour Suprême du Mali (Section Administrative), en son audience publique ordinaire du six mai deux mille vingt et un, a rendu l’arrêt dont la teneur suit :
ENTRE :
– Monsieur Al AI, Chef du Hameau de AK ayant pour conseil Maître Mahamane DJITEYE, Avocat inscrit au Barreau du Mali ;
Appelant
D’UNE PART
ET :
– Le jugement n°12 du 1er juillet 2020 du Tribunal Administratif de Kayes ; – Le Gouverneur de la Région de Kayes représenté par la Direction Générale du Contentieux de l’Etat ; – Monsieur Ab C, Chef de village de Ag, Commune Rurale de Madiga-SACKO, Cercle de Ai ayant pour conseil Maître Boubacar MAÏGA, Avocat inscrit au Barreau du Mali ;
Intimés
D’AUTRE PART
Sans que les présentes qualités puissent nuire, ni préjudicier en quoi que ce soit aux parties et sous les plus expresses réserves de fait et de droit.
EN MATIERE DE RECOURS POUR EXCES DE POUVOIR
Faits et procédure : Par acte n°14 du 24 juillet 2020, Maître Towefo MOUNKORO, agissant pour le compte de Al AI, Chef du Hameau de AK, a interjeté appel contre le jugement n°12 du 1er juillet 2020 du Tribunal Administratif de Kayes dans l’affaire opposant Ab C au Gouverneur de la Région de Kayes et en intervention forcée son client, en matière de recours pour excès de pouvoir, dont le dispositif est ainsi libellé :
« En la forme : – Reçoit le recours comme régulier ; Au fond : – Annule la décision n°2019-0037/GRK-CAB du 02 mai 2019 du Gouverneur de la Région de Kayes portant érection en village le Hameau de AK dans la Commune Rurale de Madiga-Sacko, Cercle de Diéma ; – Ordonne la restitution de l’amende de consignation versée ; – Met les dépens à la charge du Trésor public » ; Copies du mémoire ampliatif produit par Maître Mahamane DJITEYE, ont été notifiées à la Direction Générale du Contentieux de l’Etat représentant le Gouverneur de la Région de Kayes, à Maître Boubacar MAÏGA pour le compte de Ab C, Chef de village de Ag, qui ont produit mémoires en défense dont celui Ab C a suscité une réplique de la part de l’appelant ; Le 16 février 2021 sous n°429, le conseil de l’intimé déposa au greffe de la Cour ses observations sur le mémoire en réplique ; En droit : Prétentions et moyens des parties : Maître Mahamane DJITEYE, agissant pour le compte de Al AI, Chef du hameau de AK, expose dans son mémoire ampliatif : Que l’appelant entend quereller le jugement n°12 du 1er juillet 2020 qui n’a pas fait une bonne application de la loi ; Sur l’irrecevabilité pour forclusion du recours de Ab C :
Qu’aux termes de l’article 15 de la loi n°94-006 du 18 mars 1994 portant organisation et fonctionnement des Tribunaux Administratifs : « sauf en matière de travaux publics, le Tribunal Administratif ne peut être saisi que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée » ; Ab C a introduit requête n°12 consignée au greffe du Tribunal le 04 mars 2020 contre l’arrêté n°2019-0037/GRK-CAB du 02 mai 2019 du Gouverneur de la Région de Kayes ; le recours contre un arrêté pris par le Gouverneur de Kayes le 02 mai 2019 est confiné dans un délai prescrit par la loi sous peine de forclusion ; cet arrêté comme tout acte administratif de portée générale, prend effet à compter de sa publication ; Que l’arrêté n°2019-0037/GRK a été pris le 02 mai 2019 et publié au Cercle de Diéma sous le visa 928 du 21 août 2019 ; cela ressort du bordereau d’envoi de Préfet du Cercle de Diéma au Sous-préfet central, la date du 21 août 2019 ; il est évident que de la date de publication de l’arrêté du Gouverneur de Kayes à la date où Ab C a introduit sa requête en annulation, il s’est écoulé plus de 02 mois ; il convient en application des dispositions sus-visées, de déclarer le recours de Ab C irrecevable pour forclusion ; – Sur le défaut de qualité de Ab C : Qu’il ressort de l’article 118 C.P.C.C.S : « Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable sur sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai fixé, la chose jugée » ; il appert que Al AI a soulevé le défaut de qualité du Chef de village de Ag qui a sollicité l’annulation de l’arrêté n°2019-0037/GRK-CAB du 02 mai 2019 ; en effet, le hameau de AK relève de la Commune Rurale de Madiga-Sacko et non de Ag ; Que l’article 6 de la loi n°06-023 du 28 juin 2006 relative à la création et à l’administration des villages, fractions et quartiers dispose : « le village est créé par arrêté du représentant de l’Etat dans la région ou dans le district de Bamako à la demande de la communauté concernée, après avis du conseil communal et du représentant de l’Etat au niveau de la commune » ;
Que dans le mémoire en défense de la Direction Générale du Contentieux de l’Etat, le Sous-préfet de l’Arrondissement Central de Diéma soutient dans sa lettre n°018-044/SPC-D du 20 décembre 2018 au Préfet du Cercle de Diéma : « … que certains notables du hameau de AK se sont fait accompagnés par certains notables de Madiga-Sacko pour rencontrer les responsables villageois de Madiga-Sacko commune du même nom… » ; en rejetant le défaut de qualité soulevé par l’intervenant forcé, le premier jugement a fait une mauvaise application de la loi ; par conséquent, il convient d’infirmer le jugement n°12 du 1er juillet 2020 et de déclarer la demande de Ab C, irrecevable pour défaut de qualité ;
– Sur la violation de l’article 6 de la loi n°06-023 du 28 juin 2006 : Qu’aux termes de l’article 6 de la loi sus-visée : « Le village, la fraction ou le quartier est créé par arrêté du représentant de l’Etat dans la Région … à la demande de la communauté concernée, après avis du conseil communal et du représentant de l’Etat au niveau de la commune » ; il ressort du dossier que la communauté de AK sous l’égide de son Chef de village, Al AI a déposé une demande d’érection de son hameau auprès du Préfet du Cercle de Diéma ; Que contrairement à la motivation du jugement n°12 du 1er juillet 2020, il suffit que la communauté qui est le hameau de AK fasse la demande au représentant de l’Etat dans la région et que soient avisés le conseil communal et le représentant de l’Etat auprès de la commune ; suivant lettre 2019-020/PCD du 03 mars 2019, le Conseil Communal de Madiga-Sacko a été saisi par le Préfet du Cercle de Diéma en vue de donner son avis sur l’érection de AK en village ; le Conseil fût convoqué pour une session ordinaire du 26 au 30 mars 2019 et l’ordre du jour comportait entre autres, la discussion et l’adoption de l’avis du conseil communal sur l’érection de AK en village ; Que le conseil communal a été avisé et son approbation ou sa désapprobation ne lie pas l’administration contrairement à la motivation du jugement n°12 ; mieux, le village mère Ag a reçu l’avis d’érection car dans le compte rendu d’activité de la mission du Sous-préfet suivant ordre de mission n°2019-119/P-CD du 11 mars 2019 ( lettre n°2019-006/SPC-D du 15 mars 2019), les nommés Af C, jeune frère du Chef de village, Gaye KONATE, Conseiller du Chef de village, Aj C et Ac C ont conclu à un avis défavorable ; il convient d’infirmer le jugement n°12 du 1er juillet 2020 qui a fait une mauvaise application de la loi ; – Sur la violation de l’article 3 de l’arrêté n°08-0268/MATCL du 08 février 2008 : Qu’il est reproché à l’arrêté n°2019-0037/GRK-CAB du 02 mai 2019 la violation de l’article 3 de l’arrêté n°08-0268/MATCL du 08 février 2008, d’où l’annulation dudit suivant jugement n°12 du 1er juillet 2020 ; Que cette motivation ne saurait s’appliquer au cas d’espèce ; l’argument selon lequel le hameau de AK se situe sur les terres de Ag est erroné ; feu Ah AJ, fondateur du hameau de AK, bien avant l’indépendance du Mali sollicita et obtint une parcelle de terre du terroir villageois de Madiga-SACKO par le canal de Ae Y alors propriétaire coutumier de Madiga-SACKO ; mieux, le hameau est situé dans une forêt dense d’où son nom de « Ak » buisson en soninké, un habitant de Ag B Ah AJ à « sortir du bois » puis s’installer à Ag à 05 Km de distance ; Qu’à ce jour, le hameau compte plus de 1500 habitants ; que la loi exige 500 habitants en milieu sédentaire pour prétendre à l’érection d’un hameau en village ; il faut préciser que le hameau dispose d’un château d’eau pour la fourniture d’eau potable par un système de pompe solaire, 14 puits à grand diamètre, une école franco-arabe et une mosquée de vendredi construite à hauteur de 20.000.000 de F. CFA ; AK répond aux exigences prescrites par la loi pour être érigé en village ; par conséquent, c’est à bon droit que le Gouverneur de Kayes a pris la décision pour l’ériger en village ; La D.G.C.E représentant le Gouverneur de la Région de Kayes réitère les mêmes arguments contenus dans ses écritures en défense devant le Tribunal Administratif de Kayes ;
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Maître Boubacar MAIGA, pour le compte de Ab C fait valoir dans son mémoire en défense :
I – Sur la fin de non-recevoir tirée de la forclusion : Que l’appelant a opposé cette exception au recours de Ab C, Chef de village de Ag, village mère, motif pris de l’article 15 de la loi n°94-006 du 18 Mars 1994 ; cette loi fut abrogée par la loi n°2018-031 du 12 juin 2018 ( article 69) ; Qu’en motivant l’exception tirée de la forclusion par une loi abrogée, l’irrecevabilité mérite d’être rejetée ; que l’appelant n’a pu prouver la matérialité de la notification de l’arrêté querellé à l’intimé, conformément à la loi ; le délai de recours contentieux ne court qu’à compter de la notification ou de la publication ; que l’intimé sollicite le rejet de la fin de non-recevoir comme mal fondée ; II – Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité : Que l’appelant a soulevé le défaut de qualité de Ab C, Chef de village de Ag, sur le fondement de l’article 118 du C.P.C.C.S, modifié d’une part et de l’article 6 de la loi n°06-023 du 28 juin 2006 d’autre part ; que son hameau relèverait de la Commune Rurale de Madiga-Sacko et non Ag ; toutefois, les dispositions du C.P.C.C.S ne s’appliquent devant la juridiction administrative (Tribunaux Administratifs et Section Administrative) qu’aux seuls différends de vérification conformément aux articles 21 al.3 de la loi n°2018-031 du 12 Juin 2018 et 240 de la loi n°2016-046 du 23 Septembre 2016 régissant la Cour Suprême ; Comme il n’est pas question d’un différend de vérification en l’espèce, l’article 118 C.P.C.C.S ne s’applique pas et ne saurait motiver la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité ; il convient de rejeter ce moyen ; Qu’il ressort de l’article 2 de l’arrêté n°08-0268/MATCL-SG du 04 février 2008 fixant les modalités de création, de fusion et de suppression des villages, fractions et quartiers que : « Le village, la fraction ou le quartier peuvent être créés par scission ou fusion de villages, de fractions ou de quartiers déjà existants » ;
Que l’article 5 stipule : « Le dossier de création doit comporter les pièces suivantes : Une demande écrite signée par les représentants désignés de la communauté précisant la dénomination de la nouvelle entité ; le procès-verbal de l’assemblée générale des chefs de famille ayant sollicité l’érection de leur groupement en entité administrative de base ; l’avis du conseil de l’entité de base d’appartenance ; le nombre d’habitants et de familles ; l’historique du village, de la fraction ou du quartier… » ; Que le village mère ou entité de base d’appartenance qui est Ag n’est pas d’avis, avec l’érection du hameau en village autonome, eu égard aux tensions et divisions sociales dont elle sera à l’origine ; dès lors, les conditions fixées à l’article 6 sont insuffisantes ; l’avis de l’entité de base est nécessaire et indispensable ; en tant que Chef de l’entité de base, l’intimé a un intérêt suffisant lui conférant qualité à agir ; c’est pourquoi, il sollicite le rejet de l’exception tirée du défaut de qualité ;
III – Sur le fond : Que l’entité de base Ag est contre l’érection d’un de ses hameaux en village et son avis fait défaut au dossier de création du nouveau village (article 5 de l’arrêté n°08-0268/MATCL-SG du 04 février 2008) ; qu’il ressort du compte rendu d’activité du 15 mars 2019 du Sous-préfet de l’Arrondissement Central au Préfet du Cercle de Diéma, que l’entité de base d’appartenance qui est Ag n’est pas d’avis pour l’érection de AK en village autonome ; pour corroborer ces faits, le Gouverneur de Kayes dans sa lettre en date du 1er mars 2011 au Préfet du Cercle de Diéma, informait celui-ci que l’accord du village mère est indispensable pour la création du nouveau village ; Que l’arrêté annulé est intervenu au mépris de l’article 3 de l’arrêté n°08-0268/MATCL-SG du 04 février 2008 ; il est établi que le hameau de AK ne dispose pas de terroir tel qu’il ressort de divers comptes rendus et rapport de mission du représentant de l’Etat, en ce qu’il est installé sur les terres du village mère Ag ; que l’érection de ce hameau en village autonome va compromettre sérieusement l’existence du village mère ; Que les conditions fixées à l’article 6 de la n°06-023, ne suffisent pas pour la création d’un village ; si la demande de la communauté concernée, l’avis du conseil communal et du représentant de l’Etat sont nécessaires, ils ne sont pas suffisants ; il faut aussi la réunion des conditions fixées aux articles 2 et 5 de l’arrêté n°08-0268/MATCL-SG du 04 février 2008 fixant les modalités de création, de fusion et de suppression des villages, fractions et quartiers ; aux motifs de la violation de ces conditions, c’est à bon droit que le jugement n°12 du 1er juillet 2020 est intervenu ; d’où sa confirmation en toutes ses dispositions ; Maître Mahamane DJITEYE pour le compte du Chef de hameau de AK rétorque : – Sur la fin de non-recevoir tirée de la forclusion : Que le Chef de village de Ag Ab C, excipe que la fin de non-recevoir ne saurait être applicable, au motif que le Chef de Hameau de AK n’aurait pas prouvé la matérialité de la notification de l’arrêté querellé ; or, il est constant que Ab C, a introduit une requête n°12 consignée au greffe du Tribunal Administratif de Kayes le 04 mars 2020 contre l’arrêté n°2019-0037/GRK du 02 mai 2019 du Gouverneur de la Région de Kayes ; Que le recours contre un arrêté pris par le Gouverneur le 02 mai 2019 doit être exercé dans un délai prescrit par la loi sous peine de forclusion ; cet arrêté comme tout acte administratif de portée générale prend effet à compter de sa date de publication ; que l’arrêté querellé a été publié au Cercle de Diéma sous le visa 928 du 21 août 2019 ; de cette date de publication à la date où Ab C a introduit sa requête en annulation, il s’est écoulé plus de 02 mois ; en application des dispositions sus-visées , déclarer le recours de ce dernier irrecevable pour forclusion ; – Sur le défaut de qualité de Ab C, Chef de village de Ag : Que l’intervenant forcé a soulevé un défaut de qualité du Chef de village de Ag qui a sollicité l’annulation de l’arrêté n°2019-0037/GRK-CAB du 02 mai 2019 ; en effet, le hameau de AK relève de la Commune Rurale de Madiga-SACKO et non de Ag ; II – Sur le fond : Que conformément à l’article 6 de la loi n°06-023 du 28 juin 2006 relative à la création et à l’administration des villages, fractions et quartiers : « Le village est créé par arrêté du représentant de l’Etat dans la Région ou dans le District de Bamako à la demande de la communauté concernée, après avis du conseil communal et du représentant de l’Etat au niveau de la commune » ; dans le mémoire en défense produit par la Direction Générale du Contentieux de l’Etat, le Sous-préfet de l’Arrondissement Central soutient dans la lettre n°018-044/SPC-D du 20 Décembre 2018 « … que certains notables du hameau de Djimé- Ak se sont fait accompagner par certains notables de Madiga-Sacko pour rencontrer les responsables villageois de Madiga-Sacko commune du même nom… » ;
Qu’il est constant que le Conseil Communal de Madiga-Sacko a été saisi par le Préfet de Cercle de Diéma, suivant lettre n°2019-020/P-CD du 03 mars 2019 pour donner son avis sur l’érection du hameau en village ; s’agissant de l’installation de AK sur les terres de Ag, au terme d’une minutieuse investigation menée sur le terrain, il s’agit d’une version erronée des faits ; cette situation est développée dans le rapport du Sous-préfet et reste vérifiable au niveau des propriétaires coutumiers ; que le hameau du AK relève de la Commune Rurale de Madiga-Sacko et non du village de Ag comme tente de le faire croire Ab C ; Qu’en rejetant le défaut de qualité soulevé par l’intervenant forcé, le premier jugement a fait une mauvaise application de la loi ; par conséquent, il convient d’infirmer le jugement n°12 du 1er juillet 2020 et de déclarer la demande de Ab C, Chef de village de Ag irrecevable pour défaut de qualité ;
– Sur la violation des articles 5 et 6 de la loi n°06-023 du 28 juin 2006 : Qu’aux termes de l’article 6 de la n°06-023 du 28 juin 2006 : « Le village, la fraction, le quartier est créé par arrêté du représentant de l’Etat dans la Région ou dans le District de Bamako à la demande de la communauté concernée, après avis du conseil communal et du représentant de l’état au niveau de la commune… » ; Que la communauté de AK sous l’égide de son Chef Al AI, a déposé une demande d’érection de son hameau au niveau du Préfet de Cercle de Diéma ; contrairement à la motivation du jugement querellé, il suffit que le hameau de AK fasse la demande au représentant de l’Etat dans la Région et que soient avisés le Conseil Communal et le représentant de l’Etat auprès de la Commune ; Que suivant lettre 2019-020/PCD du 03 mars 2019, le Conseil Communal de Madiga-Sacko a été saisi par le Préfet de Cercle de Diéma en vue de donner son avis sur l’érection de AK en village lors de sa plus prochaine session ; le conseil fût convoqué pour une session ordinaire du 26 au 30 mars 2019 et l’ordre du jour de cette session comportait entre autres la discussion et l’adoption de l’avis du Conseil Communal sur l’érection de AK en village ; contrairement aux allégations de Ab C, l’avis du Conseil Communal n’est que consultatif ; la conformité de la décision du Gouverneur audit avis n’est exigée dans aucun texte comme l’intimé essaye de le faire croire ; Que l’article 6 sus-visé n’indique nullement un « avis conforme » mais un avis consultatif qui ne lie aucunement le représentant de l’Etat ; l’article 5 de l’arrêté n’indique nullement un avis conforme ; que le conseil communal a été avisé et son approbation ou sa désapprobation ne lie pas l’administration contrairement à la motivation du jugement n°12 ; que le village mère Ag a émis son avis car dans le compte rendu du Sous-préfet, suivant ordre de mission n°19-119/P-CD du 11 mars 2019, les nommés Af C, jeune frère du Chef de village, Gaye KONATE, Conseiller du Chef de village, Aj C et Ac C ont conclu à un avis favorable ; par conséquent, l’érection de AK en village répond aux exigences de la loi ; il convient d’infirmer le jugement n°12 du 1er juillet 2020 qui a fait une mauvaise application de la loi ; Maître Boubacar MAÏGA pour le compte de Ab C, Chef de village de Ag dans ses observations sur le mémoire en réplique, parvenues à la Cour le 16-02-2021 rappelle : – Sur le défaut de qualité de l’intimé : Que l’appelant n’apporte pas la contradiction qui remet en cause l’inapplication de l’article 118 du C.P.C.C.S ; – Sur la forclusion : Que la preuve de la notification de l’arrêté attaqué au Chef de village-mère Ag n’a jamais été établie conformément à l’article 14 de la loi 2018-031 du 12 juin 2018 régissant les Tribunaux Administratifs ; – Au fond : Que le renvoi et non le retrait de l’ordre du jour de la session du 25 au 30 mars 2019, du point relatif à l’érection en village autonome du hameau de AK est motivé par l’absence de communication du dossier relatif à la création dudit village au Maire, par l’administration ; que c’est le Maire qui est légalement habilité à fixer l’ordre du jour des sessions ; qu’en instituant l’avis du village-mère, l’esprit de la loi a bien préservé les liens socio-culturels entre les villages qu’une décision administrative ne doit pas briser ; le caractère consultatif doit être conforme, donc, l’exigence de conformité est retenue par la loi ; les champs d’arachides des DIAGOURAGA, détenteurs de la chefferie, des droits coutumiers et premiers occupants des lieux, constituent les terres de culture actuelles de AK ; Que les étapes de la procédure de création supposent une phase préliminaire, la paix et l’entente des communautés impliquées ; une phase décisionnelle, la prise de décision fondée sur la preuve de cette entente ; toute décision favorable à cette érection entrerait en contradiction avec la position actuelle dégagée par le Conseil Communal de Madiga-Sacko et du village-mère de Ag ; Que toute analyse qui occulterait les litiges pouvant naître des problèmes de terres, et le souci de maintenir la coexistence pacifique, serait erronée et ignorerait dangereusement les difficultés actuelles sur le terrain ; Que l’arrêté querellé procède de la violation de la loi, notamment l’absence d’avis requis de divers organes ou leur mépris, la violation des dispositions légales et règlementaires ; Que l’intimé sollicite le rejet de la fin de non-recevoir tirée de la forclusion et du défaut de qualité ; le rejet de l’appel et la confirmation du jugement n°12 du 1er juillet 2020 du Tribunal Administratif de Kayes en toutes ses dispositions ; Discussion juridique : En la forme : – Sur la forclusion opposée à Ab C requérant initial en annulation contre l’arrêté n°2019-0037/GRK-CAB du 02 mai 2019 : Considérant que l’appelant rappelle que Ab C a introduit sa requête le 04 mars 2020 contre l’arrêté n°2019-0037/GRK-CAB du 02 mai 2019 ; qu’i y a lieu de déclarer le recours irrecevable pour forclusion, et ce, conformément à l’article 15 de la loi n°94-006 du 18 mars 1994 portant organisation et fonctionnement des Tribunaux Administratifs : « … le Tribunal Administratif ne peut être saisi que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée … » ; Considérant que la loi n°2018-031 du 12 juin 2018 abroge toutes dispositions antérieures contraires, notamment la loi n°94-006 sus-visée et lois modificatives subséquentes ; Que l’appelant est mal venu à se prévaloir des dispositions d’une loi abrogée ; – Sur le défaut de qualité opposé à Ab C , Chef de village de Ag : Considérant que le conseil de l’appelant allègue que le hameau de AK relève de la commune Rurale de Madiga-Sacko et non du village de Ag tous de l’Arrondissement de Diéma ; ce qui ressort de la lettre n°018-044/SPC-D du 20 décembre 2018 du Sous-préfet de l’Arrondissement Central de Diéma au Préfet du Cercle de Diéma en application de l’article 6 de la loi n°06-023 du 28 juin 2006 ; que conformément à l’article 118 du C.P.C.C.S, le recours de Ab C doit être déclaré irrecevable pour défaut de qualité ;
Considérant que le requérant initial en annulation justifie la qualité pour agir en justice contre une décision portant érection en village officiel d’un hameau dépendant de son village appelé village-mère duquel les habitants sont partis pour s’installer au lieu appelé AK ;
Que l’exception tirée du défaut de qualité de Ab C ne saurait prospérer ; – Sur le fond du litige : Considérant que les chefs de famille composant le hameau de AK ont exprimé leur volonté d’ériger leur groupement en entité administrative en formulant la demande d’érection du 05-11-2018 adressée au Gouverneur de la Région de Kayes ce qui est confirmé par le procès-verbal d’assemblée générale du 19-12-2018 des chefs de famille du hameau de AK ; Que l’avis des conseillers du village mère Ag en date du 15-03-2019 ( lettre n°2019-006/SPC-D) est formel : « le Conseil de village … à l’exception des trois derniers conseillers de village venant du hameau de AK, a donné son avis favorable » ; cet avis du conseil de l’entité de base d’appartenance n’a été contesté par les parties en cause ni devant les juges d’instance ni devant la Cour de céans ; de même l’article 5 de l’arrêté n°08-0268/MATCL-SG du 04 février 2008 ne précise pas non plus que l’avis soit conforme ou qu’il lie le représentant de l’Etat ; ainsi, le village de Ag a émis son avis, il ne signale pas de menace que causerait l’érection de AK sur Ag (article 3 de l’arrêté n°08-0268/MTCL-SG du 04-02-2008) ; Considérant que la loi n°06-023 du 28 juin 2006 relative à la création et l’administration des villages, fractions et quartiers fixe les conditions de création du village comme suit : la demande de la communauté concernée, l’avis du conseil communal et l’avis du représentant de l’Etat au niveau de la commune, l’arrêté de création par le Gouverneur ; Considérant que les pièces du dossier montrent que le Maire de la Commune Rurale de Madiga-Sacko , a décidé le renvoi de l’ordre du jour de la session du 26 au 30 mars 2019, du point relatif à l’avis requis par le Préfet de Cercle de Diéma, et cela contre le gré de certains conseillers communaux ; qu’aucune illégalité ne saurait être reproché à l’arrêté n°2019-0037/GRK-SG du 02 mai 2019 motifs pris de ce que le Maire n’a jusqu’à ce jour, pas querellé le procès-verbal de carence dressé le 12 avril 2019 par le Préfet de Ai ; Considérant ce qui précède, le dossier ayant fait l’objet d’enquêtes démographique, socio-économique, d’avis du village-mère, du Sous-préfet Central de Diéma a satisfait aux exigences de la loi ; que faute de contester devant la juridiction compétente, le procès-verbal de carence du Conseil Communal de Madiga-Sacko, dressé le 12 avril par le Préfet de Ai, il convient de dire que l’intimé, ledit conseil ainsi que le Tribunal Administratif sont mal fondés à évoquer le manque d’avis consultatif de l’organe délibérant de la Commune Rurale de Madiga-Sacko qui soutient Ab C Chef de village de Ag dans sa tentative de privilégier les dispositions d’un arrêté d’application au détriment de celles de la loi ; Sur le jugement n°12 du 1er juillet 2020 : Considérant que le jugement querellé a focalisé sa motivation sur l’avis du Conseil Communal de Madiga-Sacko relativement à l’érection du hameau de AK en village, en invoquant l’article 3 de l’arrêté du Ministre de l’Z AH et des Collectivités Locales « cette création doit respecter les critères suivants : … ne pas compromettre l’existence d’un village … déjà existant ; disposer d’un terroir » ; Considérant que des pièces du dossier prouvent que l’avis du Maire, du Conseil Communal et du village-mère, a été requis ; le Conseil Communal n’a pas émis d’avis du 03 mars 2019 au 12 avril 2019, situation constatée sur procès-verbal de carence en date du 12 avril 2019 ; ainsi l’arrêté déféré a satisfait aux critères fixés à l’article 6 de la loi du 28 juin 2006 ; Considérant que relativement à l’appartenance du terroir supportant AK au village de Ag « la terre qu’occupe AK relève du droit coutumier de Ag » (page 2 lettre n°2019-006/SPC-D du 15-03-2019 du Sous-préfet de l’Arrondissement Central au Préfet du Cercle de Diéma et page 19 jugement n°12 contesté) ; cette allégation est en contradiction avec les conclusions de la même lettre n°2019-006/SPC-D (page 4) retenant que depuis 1959 AK a bien existé avant Ag Aa ; que les responsables du village de Ag s’opposent à la création du village de AK sur la base des allégations infondées et imaginaires ; que les terres où se trouve installé le hameau de AK relèvent du droit coutumier du village de Madiga-Sacko Commune du même nom, et non du village-mère Ag Aa ; Que ce fait était déjà établi par la lettre n°018-044/SPC-D du 20 décembre 2018 du Sous-préfet au Préfet de Ai donnant complément d’informations de la lettre n°18-043/SPC-D du 14 décembre 2018 à propos de l’appartenance des terres du hameau de AK Commune Rurale de Madiga-Sacko en page 2 : « incontestablement, les terres de AK appartiennent à Madiga-Sacko », et le mémoire n°2020-16/P-CD du 24-03-2020 du Préfet de Diéma ; de tout ce qui précède, l’arrêté querellé n’a pas violé la loi ; que le jugement n°12 du 1er juillet 2020 du Tribunal Administratif de Kayes a fait une analyse unilatérale de l’affaire en bâtissant la motivation sur des prétentions mal fondées ; Sur la chefferie et le Conseil de village de AK : Considérant que le Préfet de Ai, dans son mémoire en défense n°2020-016/P-CD du 24-03-2020 relatif à l’Affaire Ab C contre l’arrêté n°2019-0037/GRK-CAB du 02 mai 2019 devant le Tribunal Administratif de Kayes, fait connaître que : « tout le processus de nomination des autorités villageoises (conseillers de village et chef de village) est achevé. Au moment où les intéressés saisissaient le Ministre de l’Administration et de la Décentralisation de leur recours hiérarchique, il ne restait que la seule nomination du Chef de village qui aujourd’hui est effective. Ci-joint copies desdits actes » ; Considérant que les décisions n°19-071/P-CD du 19-10-2019 portant nomination des conseillers de village et n°20-010/P-CD du 05-03-2020 portant nomination de chef de village dans la Commune Rurale de Madiga-Sacko, sont justiciables du Tribunal Administratif de Kayes statuant en premier ressort ; Qu’aucune décision judiciaire rendue à ce sujet n’est parvenue à la Cour de céans ; il convient de dire n’y avoir pas lieu d’y statuer
Par ces motifs
La Cour Suprême du Mali (Section Administrative) où siégeaient Messieurs :
– Sory DIAKITE…..…………………Président;
– Séni OMBOTIMBE……………..Conseiller;
– Mohamed O.F TRAORE…………………….Conseiller-rapporteur ;
En présence de Monsieur David SAGARA, Rapporteur Public ;
Avec l’assistance de Maître MALE Nansika DIOUBATE,
Greffier ;
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de recours pour excès de pouvoir et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
En la forme : – Reçoit l’appel ;
Au fond : – Infirme le jugement n°12 du 1er juillet 2020 du Tribunal Administratif de Kayes ; Statuant à nouveau : – Reçoit le recours de Ab C comme régulier en la forme ; Au fond : – Le rejette comme mal fondé ;
-Dit que l’arrêté n°2019-0037/GRK-CAB du 02 mai 2019 du Gouverneur de la Région de Kayes conserve ses pleins et entiers effets ;
-Ordonne la restitution de la consignation versée, déduction faite des frais de procédure ;
-Met les dépens à la charge du Trésor public ;
Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour Suprême (Section Administrative), en son audience publique ordinaire, les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER
Suivent les signatures
Signé : illisible
DF : Gratis
Enregistré à Bamako, le 16-11-2020
Vol XXXX Fol 92 N° 04 Bordereau 1976
Reçu : Gratis
Le Chef du Centre III
Signé : illisible
REPUBLIQUE DU MALI
« AU NOM DU PEUPLE MALIEN »
La République du Mali mande et ordonne au Ministre de l’Z AH et des Collectivités Locales en ce qui le concerne et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit contre les parties privées de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.
En foi de quoi le présent arrêt a été scellé, collationné et signé par Nous Me OULARE Assanatou SAKILIBA greffier en chef de la Cour Suprême du Mali pour servir de première grosse délivrée le 03-12-2020 à M. Am An Ac, ayant pour Conseil Maître Abdoulaye A. HAIDARA, Avocat inscrit au Barreau du Mali.
Bamako, le 3 juillet 2020
Le greffier en chef
Me OULARE Assanatou SAKI LIBA
Médaillée de mérite national
SUIVENT LES SIGNATURES
SIGNE : ILLISIBLE
GRATIS
ENREGISTRE A X, LE 26-02-2018
VOL XXXV FOL 116 N°02 BORDEREAU 451
GRATIS
L’INSPECTEUR DE L’ENREGISTREMENT
SIGNE : ILLISIBLE
Pour expédition certifiée conforme
Bamako, le 15 Mars 2018
Le greffier en chef par intérim
Me Souleymane SAMAKE
REPUBLIQUE DU MALI
« AU NOM DU PEUPLE MALIEN »
LA REPUBLIQUE DU MALI MANDE ET ORDONNE AU MINISTRE DE L’Z AH ET DES COLLECTIVITES LOCALES EN CE QUI LE CONCERNE ET A TOUS HUISSIERS A CE REQUIS EN CE QUI CONCERNE LES VOIES DE DROIT CONTRE LES PARTIES PRIVEES DE POURVOIR A L’EXECUTION DU PRESENT ARRET.
EN FOI DE QUOI LE PRESENT ARRET A ETE SCELLE, COLLATIONNE ET SIGNE PAR NOUS MME OULARE ASSANATOU SAKILIBA GREFFIER EN CHEF DE LA COUR SUPREME DU MALI POUR SERVIR DE PREMIERE GROSSE DELIVREE LE 03-08-2017 A MONSIEUR Ad AG ayant pour conseil la SCPA Jurifis Consult, Avocat à la cour
BAMAKO, LE 03 Août 2017
LE GREFFIER EN CHE
MME OULARE ASSANATOU SAKI LIBA
Source: Mali, Cour suprême, 06 mai 2021, 246 (juricaf.org)
1 thought on “Titre Foncier: La remise en cause du titre foncier constitue une atteinte au droit de propriété et une violation de l’article 169 du CDF ( Mali, Cour suprême, 06 mai 2021, ARRET N° 246 ).”
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