Les fouilles « archéologico-financière » réalisées à l’Agence d’Exécution des Travaux d’Entretien Routier (AGEROUTE) par le Vérificateur général est sans appel !
Attribution de marchés à des soumissionnaires non pré-qualifiés pour un montant total de plus 617 FCFA et non-reversement des produits issus de la vente des DAO pour un montant total de 13,65 millions FCFA. Auxquels s’ajoutent, l’octroi d’avantages indus au Président du Conseil d’Administration pour un montant total de 3 ,6 millions FCFA ; le paiement de jetons de présence indus pour un montant total de 750 000 FCFA ; l’octroi d’avantages indus au Délégué du Contrôle financier pour un montant total de 4,6 millions FCFA ; le paiement d’avantages indus à un personnel qui assurait un intérim pour un montant total de 932 172 FCFA ; le paiement de primes d’assurances indues pour un montant total de 92,3 millions FCFA ; le paiement de marchés ne portant pas la preuve du paiement de la redevance de régulation pour un montant total de 633 808 FCFA ; des faux enregistrements pour un montant total de plus de 106 millions FCFA et le non-reversement de l’Impôt sur les Traitements et Salaires et de la Taxe Logement pour un montant total de plus 371 millions FCFA.
Autant de pratiques qui selon le Bureau du Vérificateur général ont précipité l’AGEROUTE dans l’abîme. Avec à la clé, plus d’un milliard FCFA (1 373 032 898F) qui se s’est évaporé pendant les exercices 2017, 2018, 2019 et 2020.
L’AGEROUTE entre parenthèses
Le gouffre financier creusé au niveau de l’AGEROUTE dépasse l’entendement. Les Directeurs sortants, Mohamed Attayer Ag Hamani et Sékou Kontaga, tous deux sont impliqués dans cette gestion outrancière de l’AGEROUTE, pendant ces 5 dernières années. D’où la paralysie de la structure à tous les niveaux. Ou presque.
Pire, les défaillances à cette époque ont annihilé les efforts du gouvernement. En clair, l’AGEROUTE dans son histoire n’a jamais connu une telle hémorragie financière. Pire, elle n’a jamais été confiée à des personnalités, aussi controversé que Mohamed Attayer Ag Hamani et Sékou Kontaga : pendant 5 ans, les caisses de la structure ont coulé. Comme le Djoliba dans son lit. Les irrégularités financières n’ont pas été comptabilisées en dizaines de millions. Mais en milliard de nos francs.
L’AGEROUTE n’a pas seulement perdu de sa superbe. Elle a été vidée de son âme, vendue au diable. Et jusque-là, ses deux anciens patrons, n’affichent qu’une image de ruine et de désolation. Et pour cause : jamais, les gaffes au sein de ce service n’ont atteint un tel degré.
Jugée, pourtant, stratégique par le gouvernement dans sa politique d’entretien du réseau routier de notre pays, l’AGEROUTE a vite fait de taire ses ambitions. Pire, il n’a pas échappé à l’appétit vorace de ses responsables. Par petite touche, ils ont « sucé » les caisses, érigé le népotisme en mode de gestion. L’espoir tant suscité auprès des populations, a viré au cauchemar.
L’AGEROUTE est malade. Malade de ses fonds qui n’ont cessé de s’évaporer ces 5 dernières années. Malade, aussi et surtout de sa Direction, sous Mohamed Attayer Ag Hamani et Sékou Kontaga . Raison invoquée par le vérificateur : des faiblesses et dysfonctionnements relevant du contrôle interne qui ont affecté la qualité de la gestion financière de la structure.
Au nombre de ces faiblesses et dysfonctionnements, il y a le déphasage entre l’acte de création de la régie d’avances et les dispositions réglementaires en vigueur, l’attribution de marchés à des soumissionnaires qui ne respectent pas les critères de qualification des DAO (Dossier d’appel d’offre), la signature irrégulière des moyens de paiement par les deux anciens Directeurs, la non-tenue des documents de la comptabilité-matières et la non-codification des matières. À ces insuffisances, il faut ajouter le paiement par la régie de factures non visées ou non certifiées.
Entre magouilles et embrouilles
S’agissant des irrégularités financières, elles s’élèvent à 1 373 032 898 FCFA et sont relatives, entre autres, à l’attribution de marchés à des entreprises éliminées lors de la phase de pré-qualification ou à des entreprises qui n’ont pas participé à cette phase, au non-enregistrement ou au faux enregistrement des marchés, à l’octroi d’avantages indus au personnel, au Délégué du Contrôle Financier et aux membres du Conseil d’Administration ainsi qu’au non-paiement des cotisations sociales et impôts et taxes sur les salaires.
En ce qui concerne les avantages accordés au personnel, ils doivent figurer dans l’accord d’établissement approuvé par délibération du Conseil d’Administration de l’AGEROUTE pour être éligibles. L’équipe de vérification a effectué des contrôles d’effectivité de certains travaux d’entretien routiers avec l’appui d’un ingénieur des constructions civiles mis à disposition par le Ministre des Transports et des Infrastructures. Ces contrôles n’ont pas décelé d’anomalies significatives en raison de certaines limites : la fin de la période de garantie de travaux examinés ; l’absence de schéma itinéraire dans les rapports finaux des missions de contrôle, ce schéma permet de connaître la localisation des tâches exécutées dans le cadre d’un marché; les difficultés pour identifier les zones concernées par la vérification, à cause des interventions de plusieurs années antérieures (2017, 2018, 2019, 2020 et 2021), avec des risques de chevauchement entre les travaux exécutés ; les difficultés d’identification des « début et fin » des zones de reconstruction et des zones de renforcement en BB3 ou BB5 ; les difficultés de mesurer les linéaires des dalles d’accès et de traversée, posées sur les caniveaux, ces dalles sont généralement occupées par des riverains ou remplacées par d’autres types de dalles ; l’inaccessibilité de certaines zones pour des raisons d’insécurité.
Bref, l’AGEROUTE a été sacrifiée sur l’autel d’intérêts égoïstes par les deux anciens DG. Autrement dit, la caisse de la structure a subi une saignée financière de plus d’un milliards de francs CFA.
En réalité, cette mauvaise gestion est le fruit d’un système bien huilé, mis en place par les deux anciens DG de l’AGEROUTE.
Selon ce système ils veillent aux « bons soins » des bonzes du ministère et à leurs propres personnes: enveloppes de fin du mois, marchés de gré à gré, bons de carburant à gogo, voyages à l’étranger et autres cadeaux en nature. Du moins, s’ils veulent éviter les « ennuis ».
Face à de telles pratiques qui ont occasionné un trou de plus d’un milliard de francs CFA à l’AGEROUTE, les enquêteurs, à l’unanimité, ont adressé une dénonciation de fait au Pôle Économique et Financier. Du coup, les deux anciens DG de l’AGEROUTE, Mohamed Attayer Ag Hamani et Sékou Kontaga sont dans la tourmente.
Dossier à suivre!
Jean Pierre James