LE MINISTRE DE LA JUSTICE, MAMADOU KASSOGUE, A DEMANDÉ DES ENQUÊTES CONTRE DES RESPONSABLES DE LA RÉFÉRENCE SYNDICALE DES MAGISTRATS ET L’ASSOCIATION MALIENNE DES PROCUREURES ET POURSUIVANTS, EN L’OCCURRENCE CHEICK MOHAMED CHÉRIF KONE ET DRAMANE DIARRA, QUI AVAIENT AU PRÉALABLE REFUSÉ DE RÉPONDRE À LA CONVOCATION DES SERVICES JUDICIAIRES POUR VIOLATION DES LOIS. POUR CES ACTEURS MIS EN CAUSE, LEURS ACTIONS NE SONT PAS EN DÉPHASAGE AVEC LE DROIT POSITIF MALIEN.
Le bras de fer entre magistrats se poursuit. Après l’échec des services judiciaires d’entendre des responsables de la Référence Syndicale des Magistrats en l’occurrence Cheick Mohamed Chérif KONE et Dramane DIARRA, c’est le ministre de la justice qui dans un communiqué se prononce sur la situation.
A cet effet, il a rappelé que depuis quelques semaines, certains acteurs de la justice, magistrats et avocats, s’adonnent à des sorties médiatiques intempestives contraires à leur statut et jurant d’avec les règles élémentaires de déontologie notamment l’obligation de réserve et le devoir de retenue en violation de la loi.
Malgré les mises en garde notamment dans l’affaire Issa Kaou N’DJIM, a regretté le ministre KASSOGUE, certains magistrats continuent à militer activement dans l’espace politique, s’abritant derrière un syndicat de magistrats en l’occurrence « la Référence Syndicale des Magistrats » et une Association dénommée « Association Malienne des Procureurs et Poursuivants » (AMPP), participent aux activités politiques d’un groupement d’organisations fondamentalement politique et porteur de revendications de nature absolument politique appelé « Appel du 20 février 2023 ».
Des enquêtes contre Chérif et Dramane
« Ces magistrats dont le comportement est à l’antipode de toutes les règles de déontologie qui gouvernent l’état de magistrat, ont même osé prendre la tête de ce groupement politique avec le poste de coordinateur général attribué au nommé Cheick Mohamed Chérif KONE, Président de la Référence Syndicale des Magistrats », a dénoncé le ministre de la justice.
Selon lui, la participation active des magistrats à ce groupement, même avec la couverture syndicale n’est pas conforme à l’éthique et à la déontologie de cette profession et viole les articles 19 et 20 du code de déontologie, 71 de la Loi du 16 décembre 2002 portant statut de la magistrature.
C’est au regard de la gravité de ces actes et des comportements mentionnés, le ministre de la justice a affirmé avoir instruit l’Inspection des Services judiciaires d’ouvrir des enquêtes sur les agissements de ces magistrats qui sont susceptibles de constituer des fautes professionnelles, disciplinaires ou pénales.
A l’issue de ces enquêtes, les deux magistrats mis en cause ont refusé de répondre aux convocations qui leur avaient été adressées par l’Inspecteur en Chef des Services judiciaires.
« Ces faits sont susceptibles de constituer le délit d’opposition à l’autorité légitime prévu et puni par les dispositions de l’article 84 du Code pénal », a déclaré le ministre KASSOGUE.
Par ailleurs, donnant suite aux faits constatés dans le rapport d’inspection, le ministre de la Justice et des droits de l’Homme informe l’opinion qu’il a non seulement saisi le Conseil supérieur de la Magistrature pour l’ouverture d’une enquête disciplinaire mais aussi qu’il a ordonné au Procureur général près la Cour d’Appel de Bamako d’ouvrir une enquête judiciaire contre les susnommés pour opposition à l’autorité légitime et toutes autres infractions que les enquêtes feront découvrir.
La réplique au ministre KASSOGUE
Les répliques de l’AMPP et la REFSYMA ne vont pas se faire attendre. Également dans un document dont nous avons reçu copie, les deux organisations des magistrats répondent au ministre de la Justice.
« L’AMPP et la REFSYMA convaincues qu’aucun de leurs dirigeants n’a transgressé ni une disposition pénale ni une règle d’éthique ou de la déontologie judiciaire, encore moins le devoir de réserve du magistrat dans la situation d’espèce, n’entendent pas se plier aux excès d’un ministre très partial ayant montré ses limites, refusent de se laisser intimider dans l’exercice légal de leur liberté d’expression, d’association et de réunion garantie par la constitution », ont répliqué de leur côté les deux organisations de magistrats dans un communiqué signé par Cheick Mohamed Chérif KONE.
En saisissant le Conseil supérieur de la magistrature pour une enquête disciplinaire, M. KONE estime que le ministre, dans une démarche de redorer son blason, puisse prétendre l’initier à la légère sur un coup de cœur « pour satisfaire les caprices de quelques princes du jour ».
Par ailleurs, en défendant leur refus de répondre aux services judiciaires, le magistrat par Cheick Mohamed Chérif KONE invite le ministre à prouver que le refus de répondre à une invitation d’une autorité non habilitée serait constitutif d’une infraction dans le code pénal malien.
A cet effet, ils défient le ministre de produire une seule convocation d’une quelconque autorité légitime qui n’aurait pas été répondue par un de leurs dirigeants ou membres.
Également, le communiqué de l’AMPP et de la REFSYMA dénonce le deux poids, deux mesures du ministre KASSOGUE pour avoir intervenu sur le champ politique.
Ce dernier, soutiennent les organisations, autoriserait des groupes de magistrats à s’allier au pouvoir politique pour soutenir publiquement un projet de constitution manifestement illégal et rétrograde qui remet en cause l’indépendance de la magistrature, et qui déciderait en même temps de réduire au silence, au nom du devoir de réserve d’autres ayant des positions contraires pour des raisons évidentes tenant au devoir du magistrat.
L’AMPP et la REFSYMA se disent se dissocier ouvertement de cette entreprise en cours depuis la transition dite de rectification, tendant à faire de l’institution judiciaire , un organe de la transition, et à faire des magistrats des bras séculiers de répression des voix réclamant le retour à l’ordre constitutionnel, conformément à la charte de la transition et au serment pris solennellement par le président de la transition devant le peuple souverain.
A cet effet, l’AMPP et la REFSYMA ne sont pas en déphasage avec le devoir de réserve du magistrat en s’associant à d’autres composantes de la nation pour défendre la légalité constitutionnelle et la forme républicaine de l’Etat, lesquelles considérations ne sauraient être ramenées aux seules questions purement politiques.
PAR SIKOU BAH
Source : Info Matin