Alors que 70% des populations pauvres des pays en développement sont tributaires, directement ou indirectement, de l’agriculture comme source de revenus, l’intensification et l’accroissement de la production agricole en tant que moyen de réduire durablement la faim et la pauvreté se heurtent à de graves contraintes. La pression se faisant sur les ressources naturelles, la dégradation des sols qui perdent leur fertilité, de même que l’insuffisance des infrastructures rurales et l’inadéquation des systèmes de production faisaient partie, entre autres, de ces contraintes.
Toutefois, c’est surtout l’accès aux marchés, l’existence des barrières commerciales entravant un commerce agricole équitable et les subventions agricoles qui ont retenu l’attention des intervenants au sommet pour le développement durable. Soulignant le paradoxe qui existe, à l’échelle mondiale, entre la production agricole des pays en développement, moteur de la croissance et celle des pays développés, largement subventionnée, M. Pedro Sanchez, Directeur exécutif du Centre international de recherche en agroforesterie, a lancé un appel pour que le Sommet de Johannesburg reconnaisse la nécessité de faciliter l’accès aux marchés des petits exploitants par une aide à une production substantielle. Il ne s’agit pas de privilégier les petits exploitants au détriment de l’industrie agroalimentaire, mais plutôt d’établir une égalité entre ces deux modèles de production, a pour sa part estimé le représentant de la Banque mondiale.
L’amélioration durable de la productivité des petits exploitants des pays en développement étant la véritable question, le représentant du Fonds des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a souligné l’importance de l’accès à des technologies leur permettant de dégager des excédents et de répondre à la demande des pays riches. M. Swaminathan, représentant de la Fondation du même nom, a alors engagé les pays industrialisés à ménager un espace commercial
pour les produits du Sud. A ce propos, le Directeur exécutif du Centre international de recherche en agroforesterie a proposé que 5% des subventions du Nord soient réaffectés dans les programmes de lutte contre la pauvreté et la faim dans les pays en développement.
Les législations et réglementations publiques doivent encourager et soutenir l’agriculture durable, notamment par la mise au point d’un cadre institutionnel adéquat qui autorise, comme l’a souhaité le représentant des Etats-Unis, une réelle participation des agriculteurs au processus de prise de décision. Un large soutien public et le développement des partenariats avec le monde des affaires et le secteur privé est dans ce contexte indispensable mais la priorité doit être donnée à la diversification des cultures afin de mettre un terme, en particulier à la perte de fertilité des sols.
Le Sommet de Johannesburg discutera des questions intersectorielles à savoir les finances, le commerce, le transfert de technologie, l’information, les modes de consommation et le renforcement des capacités lorsqu’il reprendra ses travaux, cet après-midi.
PRÉSENTATION SUR L’AGRICULTURE
Le représentant de la Fondation MSS Swaminathan a déclaré que le développement de l’agriculture est le meilleur filet de sécurité contre la pauvreté et la faim dans la plupart des pays en développement. Le monde d’aujourd’hui connaît deux grands types de développement agricole. Celui constitué par l’agro-industrie des pays industrialisés qui a pour fondement des capitaux et des subventions importants. La petite agriculture domine, quant à elle, dans les pays en développement. A cet égard, la plupart des agences internationales ont reconnu l’importance de la micro-entreprise qui représente une des façons de réaliser les objectifs de réduction de la pauvreté. C’est pourquoi les politiques commerciales doivent permettre la viabilité économique de la micro-entreprise dans les pays en développement.
S’il faut défendre les biens acquis, il ne faut cependant pas sombrer dans le triomphalisme, a mis en garde le représentant. Face aux problèmes climatiques, il faut étendre les progrès technologiques aux zones marginales qui n’ont pas bénéficié de la croissance économique. Il faut également développer les formes de cultures sous-utilisées telle que celle du millet. De nouveaux progrès restent à réaliser. Il faut notamment diversifier la production agricole, augmenter les produits primaires et développer l’emploi agricole. Pour réaliser tout cela, il est nécessaire de mettre en place des structures institutionnelles adéquates. Il faut également développer les échanges et s’efforcer d’attirer les jeunes dans l’agriculture.
M. PEDRO SANCHEZ, Directeur du Centre international de recherche sur l’agroforesterie, a mis en avant le lien entre énergie, santé et agriculture dans la mesure où à l’échelle locale, ces trois éléments sont essentiels pour améliorer la productivité des agriculteurs dans les zones rurales. Il a souligné le paradoxe de la production agricole dans le monde, entre les pays en développement où l’agriculture est le moteur de la croissance, et les pays développés de l’OCDE, où l’agriculture est largement subventionnée pour continuer d’être productive. Il importe que le Sommet de Johannesburg se penche sur ce paradoxe car la question de l’agriculture est essentielle pour le développement durable, a-t-il ajouté. Regrettant que le continent africain n’ait pu bénéficier de la révolution verte, il a souhaité que des mesures soient prises pour endiguer la faim et mettre un terme à la perte de fertilité des sols sur le continent africain. Pour lutter contre la stérilité des sols, il faut par exemple les enrichir en utilisant l’azote qui est dans l’air afin de réduire les coûts résultants de l’utilisation des engrais et des fertilisants qui, en Afrique, sont vendus au prix le plus élevé aux populations les plus pauvres.
M. Sanchez a fait part de certaines initiatives lancées dans de nombreux pays africains tels que le Kenya, le Zimbabwe, l’Ouganda, le Burundi ou le Rwanda, où près de 150 000 petits agriculteurs ont été aidés afin de mettre en oeuvre ces nouvelles techniques de production et de fertilisation de leurs terres et également de diversification de leur production. Il faut maintenant étendre ces techniques à l’ensemble des agriculteurs africains, a-t-il estimé, car elles ont prouvé leur efficacité en terme de productivité, mais aussi en termes de préservation de la biodiversité. A cet égard, M. Sanchez a souligné l’intérêt des partenariats pour l’Afrique dans le cadre du NEPAD, afin d’associer d’une part le monde des affaires et le secteur privé, pour ce qui est des débouchés des produits agricoles, et d’autre part l’État et les collectivités territoriales, pour ce qui est des infrastructures, ceci afin de permettre aux agriculteurs d’acheminer leurs productions vers les marchés. M. Sanchez a assuré qu’il est possible de faire reculer la faim dans les pays pauvres mais que tout cela dépend de la volonté politique.
Échange de vues entre experts sur l’agriculture
Après ces deux interventions, l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Sommet mondial et Modérateur, M. JAN PRONCK, a demandé au représentant des agriculteurs de réagir au «message d’espoir» qu’ont lancé les précédents orateurs. Le représentant agricole s’est dit favorable à la proposition de mettre sur pied de nouveaux modèles de production et des structures institutionnelles propres à assurer la participation des agriculteurs à tous les processus de décision que ce soit sur la mise au point de nouvelles technologies ou de programmes de réduction de la pauvreté des agriculteurs dans les pays en développement ou de réduction de la faim dans le monde. L’agriculture, a souligné le représentant de ce secteur, est indispensable à la préservation de la biodiversité. Il a jugé important que des partenariats soient établis avec le groupe du monde de l’industrie et du commerce et un certain nombre d’institutions pour aider les agriculteurs à améliorer leur capacité de production durable.
Une agriculture durable, a-t-il précisé, est une agriculture qui permet à chaque agriculteur de vivre de son métier et qui encourage les jeunes agriculteurs. Une agriculture durable, a-t-il insisté, est une agriculture qui tient compte de l’environnement et de la préservation des ressources et des patrimoines. Faut-il faire un choix entre les deux modèles d’agriculture –petits exploitants et industries agroalimentaires- qui existent actuellement? a demandé le Modérateur avant de s’entendre répondre par le représentant de la Banque mondiale que des choix se font. Il ne s’agit pas, a-t-il expliqué, de privilégier l’un au détriment de l’autre mais de reconnaître la nécessité d’encourager les petits exploitants à produire substantiellement et de leur faciliter l’accès aux marchés.
Le monde, a poursuivi le représentant de la Banque mondiale, a aussi besoin de la culture à grande échelle. En fait, la solution est d’assurer une égalité entre ces deux modèles. Répondant à son tour, le représentant du Fonds des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a souligné qu’il reste encore beaucoup à faire pour venir en aide aux petits exploitants. Il est important, a-t-il dit à son tour, que ces derniers aient accès à des technologies leur permettant d’améliorer durablement la productivité des ressources dont ils disposent. Pratiquement, comment faire que les petits exploitants aient des excédents à mettre sur le marché? A cette question, le Directeur exécutif du Centre international de recherche en agroforesterie a jugé qu’il faut d’abord disposer des bonnes technologies permettant aux petits exploitants de répondre à la demande des pays riches.
Commentant ces propos, le représentant des ONG a voulu mettre l’accent sur le fait que l’agriculture représente bien plus que l’argent pour les paysans. Il s’agit véritablement d’un mode de vie. Il a souligné la nécessité de renforcer leur capacité à prendre des décisions. Il est important de faire en sorte que les paysans aient le pouvoir d’explorer les possibilités qui s’offrent à eux. Soulignant que la majorité des agriculteurs et des affamés dans le monde sont des femmes, la représentante des femmes en a conclu que les solutions ne peuvent provenir que des femmes. A ce propos, elle a souligné combien les grandes exploitations se font au détriment de l’espace agricole, de la finance et de l’économie des petites exploitations, dirigées majoritairement par des femmes. Elle a plaidé pour la réforme foncière et la promotion du droit des femmes à la terre. Elle a demandé qu’une révision des processus de privatisation de l’eau qui menace la sécurité alimentaire soit faite. La biodiversité ne peut être privatisée puisque les femmes en dépendent pour survivre. «On ne peut pas monopoliser la terre», a insisté la représentante des ONG.
La défense des droits provoque toujours des applaudissements mais la question est plus difficile qu’on ne le croit, a commenté le représentant de l’IFAD. La complexité vient du fait qu’il s’agit en fait d’influencer les politiques nationales, a-t-il souligné. Pour lui, il faut donner aux organisations des pauvres plus de poids et de pouvoir. A cela, le représentant des autorités locales a ajouté qu’en Afrique du Sud, un rôle central est attribué aux gouvernements locaux en matière de développement durable. Mais cette approche du bas vers le haut est-elle aussi une caractéristique de la révolution verte en Asie? a demandé le Modérateur au représentant de la Fondation MSS Swaminathan.
Naturellement, a répondu ce dernier. La place de l’Inde comme premier producteur mondial de lait a été assurée par les coopératives qui ont été soutenues par les politiques et les cadres institutionnels requis. La révolution verte a aussi été aidée par les nouvelles technologies qui ont multiplié par trois ou quatre la production de lait. La méthode a été d’organiser un grand nombre de démonstrations dans les exploitations extrêmement pauvres. La philosophie a été de penser que «ce que peuvent faire les petits exploitants peut être fait par les grands». En conséquence, l’Inde a pu observer un véritable mouvement de masse qui, en cinq ans, a fait faire à la production de lait un saut qualitatif. En fait, en Inde, il s’est agi de faire jouer les deux modèles de culture. Nous partons d’une approche du bas vers le haut et nombre de réussites sont dues aux agriculteurs qui ont su se prendre en main, a acquiescé le Directeur exécutif du Centre international de recherche en agroforesterie qui a cependant ajouté, aujourd’hui, il faut un peu de haut vers le bas pour rationaliser les processus.
Les peuples autochtones, selon leur représentante, ne doivent pas être dépossédés de leurs propriétés. C’est pourquoi lance-t-elle un appel pour que des initiatives soient prises afin de protéger leurs pratiques traditionnelles. Les organismes génétiquement modifiés représentent une menace car ils risquent de contaminer les ressources naturelles. Les gouvernements doivent prendre des mesures pour que les peuples autochtones puissent défendre leurs droits.
Le représentant des entreprises, en ce qui concerne le rôle des sociétés multinationales, a fait savoir que certaines d’entre elles ont initié des petites exploitations durables en coopération avec des communautés locales. Pour sa part, le représentant des syndicats a souhaité que l’existence des travailleurs agricoles saisonniers et migrants soit pleinement reconnue afin de pouvoir leur offrir des emplois sûrs. M. Swaminathan, sur la question de savoir comment faciliter l’accès des produits sur les marchés, a indiqué que le problème majeur est celui des barrières sanitaires que les pays en développement ne sont pas en mesure de lever.
Le représentant de l’Organisation mondiale du commerce a souligné qu’il faut tenir compte du fait que les pays les plus pauvres sont tributaires d’importations de produits agricoles alors que dans le même temps, l’accès aux marchés leur est limité. Il a exhorté les donateurs des pays riches à aider les pays pauvres à avoir une meilleure compétitivité dans leur production agricole. Abordant la question des négociations commerciales, M. Pronk a souligné que la question de l’accès aux marchés des produits des pays du Sud n’avait pas beaucoup progressé depuis la réunion de l’OMC de Marrakech en 1994 voire même depuis celle de Doha en 2001. Interrogé sur le regard que portent les jeunes concernant ces négociations, leur représentant a fait part de leurs inquiétudes concernant, d’une part, les barrières douanières et les subventions qui compromettent les efforts consentis par les pays du Sud dans la voie de la libéralisation de leurs échanges commerciaux et de leur production agricole et, d’autre part, concernant les organismes génétiquement modifiés (OGM), le représentant des jeunes demandant que cette question soit traitée avec toutes les précautions d’usage.
S’agissant des subventions à l’agriculture, le modérateur, M. Pronk, a demandé au monde des affaires pourquoi il ne défend pas une libéralisation des échanges et une levée des subventions à l’agriculture? La représentante du monde des affaires a assuré que le monde des entreprises est favorable à une libéralisation des échanges et de l’agriculture répondant à un principe de justice. Soulignant l’importance pour les pays en développement de pouvoir commercialiser leurs produits, elle a estimé que les pays qui élèvent des barrières ne peuvent continuer de le faire. Pour ce qui est de la position des syndicats, leur représentant s’est prononcé pour une élimination graduelle des subventions, exhortant les gouvernements à agir en ce sens. La représentante des femmes a quant à elle jugé que les entreprises ne pouvaient pas demander la levée des subventions dans la mesure où elles en sont les principales bénéficiaires pour ce qui est de la commercialisation des engrais et des fertilisants ou de la recherche sur les OGM. Prenant l’exemple de son pays, l’Inde, la représentante des femmes a déploré que 20 000 agriculteurs se soient suicidés en une année en raison du fait qu’ils n’étaient pas en mesure de rembourser leurs dettes. Elle a ajouté que 70% des petits agriculteurs indiens sont victimes du dumping sur le marché mondial.
Se tournant vers les agriculteurs, M. Pronk leur a demandé si, dans les pays développés, ils pouvaient vivre sans subventions. Leur représentant a expliqué que l’objectif des exploitants agricoles est de vivre de leur métier et que si le coût de production réel des produits agricoles peut être répercuté sur le marché, dans les pays du Nord, ils n’ont plus besoin de compensations et de subventions. Le représentant des agriculteurs a plaidé en faveur d’une approche qui tienne compte des spécificités de chaque continent et de chaque région car, a-t-il dit, il existe une différence entre production agroalimentaire et agriculture vivrière. Le représentant du PNUD a pour sa part défendu une approche complémentaire qui encourage des transferts de technologies du Sud vers le Nord, ajoutant que ce dont les agriculteurs africains ont besoin, ce n’est pas uniquement un renforcement des capacités mais surtout des stimulants tels que l’accès aux marchés.
Pourquoi la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) n’exerce-t-elle pas une pression sur les pays du Nord. N’ayant pas obtenu de réponses de la part des institutions de l’ONU qu’il a jugées «timides», le Modérateur s’est tourné vers le représentant de la Fondation MSS Swaminathan. Pour lui, à moins que les pays industrialisés n’adoptent des politiques adéquates, tous les objectifs de développement de la Déclaration du Millénaire resteront lettre morte. Les pays industrialisés, a-t-il insisté, doivent ménager un espace commercial pour les produits du Sud. Le Sommet de Johannesburg doit lancer un message au G-8 pour qu’il réfléchisse aux mesures requises.
Pourquoi n’y aurait-il pas de subventions aux agriculteurs pauvres, s’est exclamé le Directeur exécutif du Centre international de recherche en agroforesterie en proposant que 5% des subventions du Nord soient réaffectés dans les programmes de lutte contre la pauvreté et la faim dans les pays en développement. Que peuvent faire les scientifiques pour améliorer la prise de décisions? a demandé le Modérateur auquel a répondu la représentante de cette communauté en disant que les scientifiques doivent penser de façon plus intégrée. Il faut penser «science nationale» mais aussi réfléchir à l’impact de cette science sur les prix du marché ou la production. La représentante a reproché aux gouvernements de ne pas accorder l’attention requise à la science et à la technologie.
Malheureusement, a-t-elle dit, les investissements se sont concentrés sur l’industrie agroalimentaire au détriment des besoins des petits exploitants. Il est grand temps d’intégrer ces dernières et les connaissances autochtones dans la recherche. La recherche, a-t-elle poursuivi, doit porter sur les mécanismes de protection et de contrôle mais devra s’élargir aux secteurs marginalisés. Il s’agit de produire plus avec moins et la science doit penser aux moyens d’y parvenir.
Qu’en est-il de la réforme foncière? a demandé le Modérateur. A cela, le représentant des autorités locales a répondu qu’en Afrique du Sud, les communautés rurales sont confrontées à un système de terres possédées soit par l’Etat soit par les grands exploitants. Il a plaidé pour une approche intégrée dans la redistribution des terres qui, en Afrique du Sud ne mènerait pas forcément à une occupation plus dense des terres mais à une amélioration des rendements. Il faut, a encore dit le représentant, encourager les communautés rurales à devenir propriétaires des terres pour s’assurer des bénéfices durables à long terme.
Avant de passer aux représentants des gouvernements, le Modérateur leur a posé deux questions. Que faut-il faire dans les années à venir pour que les petits exploitants aient la possibilité d’accroître leur rendement et leur revenu et qu’ils aient un excédent à mettre sur les marchés? Comment améliorer la gouvernance agricole dans les pays du Nord pour assurer la survie du Sud.
Débat interactif
Le Ministre de l’agriculture du Cap-Vert a indiqué que l’agriculture de son pays est caractérisée par l’incertitude, due notamment à la sécheresse. La question de l’agriculture est donc liée à la maîtrise de l’eau sans laquelle il ne sera pas possible d’assurer un développement durable. Les gouvernements des pays doivent agir mais les partenaires du développement ont également leur part de responsabilité.
Le Secrétaire adjoint du département de la culture des États-Unis a estimé que les politiques nationales sont importantes mais que la participation des agriculteurs au niveau local l’est également. En ce qui concerne les questions liées au commerce international, le représentant a indiqué que son pays est disposé à poursuivre les négociations à ce sujet.
Le Ministre de l’agriculture de l’Autriche a estimé que les infrastructures locales et l’existence de structures sociales solides sont indispensables pour que les agriculteurs puissent continuer à produire. Pour sa part, le Ministre de la planification de l’Iraq a estimé qu’il faut partager les ressources hydrauliques de façon équitable. L’agriculture occupe une place importante dans les plans de développement du pays. Cependant, l’embargo dont souffre l’Iraq fait obstruction au développement agricole du pays. La réforme foncière ne peut avancer et il est impossible d’importer les machines nécessaires.
Le Ministre du logement et de l’environnement de l’Uruguay a indiqué que l’agriculture emploie 50% de la main-d’œuvre du pays. Des activités ont donc été mises au point aux niveaux national et international. Cependant, la question des subventions représente une barrière majeure qui empêche le développement durable des pays en développement.
La représentante du Lesotho a exhorté les Etats Membres de mettre en oeuvre Action 21 tel qu’il a été conçu après Rio. La sécheresse en Afrique australe a eu des effets dévastateurs sur la production agricole de toute la sous-région, a-t-elle indiqué, ce qui, conjugué aux subventions qui ont été un obstacle au développement agricole des pays du Sud, et au développement des OGM, est très inquiétant dans la mesure où la diversité biologique est menacée.
Le représentant du Groupe consultatif sur la recherche agricole internationale a plaidé pour une agriculture qui ne menace pas l’environnement et qui contribue à lutter contre la pauvreté. Pour cela, il a demandé aux bailleurs de fonds d’encourager le développement d’une agriculture verte par un appui financier.
Le Ministre de l’agriculture de la République-Unie de Tanzanie a expliqué que dans son pays, des possibilités de crédits pour les petits cultivateurs seraient de nature à encourager une amélioration de la productivité agricole, mais a regretté que cette option ne soit pas retenue par les institutions financières en raison des aléas climatiques qui ne garantissent pas un recouvrement des crédits. Il a insisté sur l’électrification rurale comme moyen de renforcer la production agricole. S’agissant des subventions, il a jugé qu’elles créent des déséquilibres et qu’elles doivent être supprimées, le Ministre s’interrogeant sur les deux poids, deux mesures de la part des institutions de Bretton Woods qui interdisent ces subventions au Sud mais les tolèrent au Nord. Se tournant vers les États-Unis, le Ministre tanzanien a souhaité que l’AGOA ouvre des possibilités commerciales authentiques aux pays africains sur le marchés américain.
Le Ministre de l’environnement de la Côte d’Ivoire a fait part des efforts de son Gouvernement en matière de stabilisation de la production agricole, de gestion de la propriété, et de responsabilisation des populations dans la gestion des terroirs. Le Gouvernement encourage par ailleurs une plus grande transformation locale et une diversification de la production agricole et entend alléger les tâches des femmes en assurant une petite mécanisation des zones agricoles.
Le Ministre de l’environnement et des forêts du Bangladesh a précisé que l’agriculture représente 50% du PNB dans son pays et emploie 2/3 de la population active. Depuis peu, notre pays est autonome pour ce qui est de la production de riz, a-t-il ajouté, mentionnant également les programmes de développement de cultures écologiques telles que la jute qui pourrait remplacer à terme les autres synthétiques jugés peu écologiques. Il a insisté sur la nécessité de protéger la diversité biologique pour assurer la durabilité de l’agriculture et la sécurité alimentaire.
A son tour, le Ministre de l’agriculture de l’Ethiopie a dénoncé les restrictions à la croissance agricole. A ce titre, il a cité l’absence de terres arables, les mauvaises infrastructures rurales ainsi que le manque d’électrification, de transports et d’irrigation. Il a dénoncé l’inadéquation des marchés financiers en zones rurales, la mauvaise diffusion de l’information et l’absence de réformes institutionnelles. La question est donc de trouver les ressources financières nécessaires à l’amélioration de la situation, a estimé le représentant. Le financement du développement agricole équivaut à financer le développement durable, a insisté le représentant, a-t-il insisté avant de plaider pour la stabilisation des marchés et le transfert des technologies écologiquement saines. Intervenant, le représentant de la Commission européenne a fait part d’une nouvelle approche politique de la Commission visant à s’attaquer à la pauvreté rurale. Il a rappelé que la production agricole devant s’accompagner de meilleurs marchés, l’Union européenne a mis au point l’«Initiative tout sauf les armes» pour les PMA. Il a invité les autres pays développés à emboîter le pas en élaborant, entre autres, de nouvelles règles commerciales, dans le cadre de la cinquième réunion ministérielle de l’OMC. Ces règles doivent porter sur un meilleur accès aux marchés et à la réduction des subventions à l’exportation.
Pour sa part, le Ministre de l’agriculture du Malawi a rappelé la condition de «Zone sinistrée» de son pays suite à l’échec de la production agricole. Pourtant, il y a quatre ans, le pays était autonome au plan alimentaire grâce à un programme spécifique qui s’adressait aux petits cultivateurs en zones rurales à qui l’on distribuait semences et engrais. Or, les organisations internationales ont décidé de mettre fin à l’assistance à ce programme en invoquant le risque d’un syndrome de dépendance. Si le programme avait été appuyé correctement le pays ne connaîtrait pas la situation actuelle, a insisté le Ministre. Il a annoncé que cette année, le Gouvernement entend viser 3 millions de familles qui recevront 15 kilos d’engrais et 15 kilos de semences. Ce programme a facilité l’accès aux intrants agricoles pour les petits exploitants, élément essentiel de l’autosuffisance alimentaire et agricole.
Il est absolument nécessaire que la mondialisation permette un développement équitable, a estimé le représentant des populations autochtones avant de dénoncer le mépris qu’affichent les gouvernements à l’égard des populations indigènes à qui ont a imposé des cultures d’exportation. Le rôle des grandes multinationales est bien connu, a ajouté le représentant en précisant que c’est le monde qui, par ses investissements gigantesques, a détruit les technologies traditionnelles. Il est inadmissible, a encore dit le représentant, d’entendre que les pays riches connaissent une surproduction alors que dans les pays pauvres des milliers de personnes continuent de mourir de faim. La situation est facile à comprendre lorsque l’on constate les millions de dollars que les pays riches consacrent aux subventions agricoles. En fait, les Etats et les gouvernements ont abdiqué leur rôle économique au profit de l’économie de marché. Il est plus que jamais impératif de changer les modes de production et de consommation agricole, a-t-il conclu.
Abondant dans ce sens, la représentante du Royaume-Uni a préconisé à ses collègues de s’inspirer de la sagesse naturelle des populations rurales et d’utiliser leurs connaissances et leur savoir. Elle a aussi plaidé pour une révision des régimes fonciers et l’amélioration de l’accès aux crédits, aux marches financiers et aux services. S’agissant des excédents à écouler sur les marchés internationaux, elle a souligné que pour les petits exploitants des pays en développement, la question est d’abord de transporter leur production sur les marchés locaux. Elle a donc souligné la question des infrastructures. Concluant sur la question du renforcement des capacités, elle a indiqué que son pays consacre 10 millions de livres sterling à l’assistance technique pour placer les pays en développement à la hauteur des normes requises pour l’accès aux marchés des pays développés. En matière de gouvernance agricole dans les pays du Nord, elle a admis le caractère impressionnant des subventions agricoles par rapport à l’aide publique au développement (APD). Elle a jugé important de poursuivre le programme de Doha en soulignant l’utilité d’inviter le G-8 à mener une réflexion approfondie sur l’objectif de développement pour tous.
Le représentant de la Guinée Équatoriale s’est interrogé sur la pertinence des stratégies de développement agricole mises en oeuvre depuis une dizaine d’années dans la mesure où elles ont produit peu de résultats. Il faut par conséquent travailler au développement des infrastructures et des services nécessaires (eau, assainissement, santé, éducation, etc.) afin de permettre aux agriculteurs d’améliorer leur production et leur productivité.
Le Secrétaire d’État à l’agriculture de l’Australie a jugé que les subventions pratiquées dans les pays de l’OCDE sont néfastes pour un développement agricole durable et injustes. Toutefois il a plaidé en faveur de subventions à la recherche et au développement pour aider les petites exploitations à renforcer leurs capacités et améliorer leur productivité.
Le Ministre de l’environnement de la République arabe syrienne a fait état des politiques mises en oeuvre dans son pays en matière de préservation des forêts et de reboisement en arbres fruitiers écologiquement rationnels. Il a fait état en outre de mesures pour sauvegarder certaines régions protégées et mentionné le Plan national de lutte contre la sécheresse développé en collaboration avec le PNUD. Par ailleurs, a-t-il avancé, des méthodes d’irrigation modernes sont développées tandis que le Gouvernement encourage le secteur privé à utiliser ces nouvelles technologies. Le Ministre a souhaité une intensification des efforts internationaux dans le domaine de l’application des instruments relatifs aux changements climatiques, à la désertification.
Le représentant de la Roumanie a insisté sur l’économie et l’agriculture des montagnes, prenant l’exemple de la région des Carpates qui représente 75 000 km2 et abrite une des diversité biologique les plus importantes de la planète. Afin de tenir compte de cette réalité géographique, le Gouvernement roumain a mis en place des programmes de préservation de la biodiversité et de formation des jeunes agriculteurs à la protection de l’environnement et des écosystèmes, ainsi que des programmes visant à encourager la diversification de la production.
Le Ministre de la Jeunesse, de l’environnement, de la santé publique du Sénégal, a souligné que l’agriculture dépend en grande partie de la préservation des ressources forestières et hydrauliques. L’agriculture africaine rencontre des problèmes importants, tels que l’équipement rudimentaire des exploitations, contraire à une amélioration de la productivité, et la détérioration des sols et des terrains fertiles en raison de la sécheresse et des changements climatiques. Le Ministre a jugé que la pratique de la monoculture de certains produits rentables au détriment de l’agriculture vivrière menace le développement durable du secteur agricole sur le continent et a ajouté qu’un autre obstacle réside dans le manque d’infrastructures qui ne permet pas aux agriculteurs d’écouler leurs produits. Le Fonds pour l’environnement mondial (FEM) devrait pouvoir devenir un mécanisme de financement de la mise en oeuvre de la Convention sur la désertification, a-t-il dit, assurant que la volonté politique existe au plan national et qu’elle pourrait exister au niveau international vu que la politique des deux poids, deux mesures n’a pas disparu dans la pratique des subventions à l’agriculture.
La Ministre de l’agriculture de l’Afrique du Sud a souligné l’importance des investissements dans la recherche agricole. Elle a posé la question de savoir comment traiter les distorsions liées au recours accru aux subventions dans les pays du Nord. La représentante du monde de l’industrie a quant à elle plaidé en faveur de la constitution de réseaux et de partenariats stratégiques. Le régime foncier est étroitement lié à la dégradation des terres arables, a estimé pour sa part la Ministre de l’environnement du Venezuela qui a également lancé un appel aux pays du nord pour qu’ils mettent un terme à la pratique des subventions.